Un oeil dans la rue

Autour du pot avec JBC

Aujourd’hui, à y regarder de plus près, rares sont les street artists parisiens avec un engagement « politique » ou des idées engagées qui se retranscrivent dans leurs oeuvres. Evidemment l’acte en lui même a une signification, une force, mais que l’on peut relativiser, car coller aujourd’hui dans les rues de la capitale n’est pas (ou plus) si risqué.

Lors de collages en journée, l’artiste est même parfois directement confronté aux passants avec qui une conversation est souvent amorcée. On pourrait appeler cela du Street Art de proximité.

Entre différents aller-retour en Amérique du sud, dont il tire son influence et une partie de ses convictions, nous avons rencontré JBC, street artist atypique et engagé.

Comment en es-tu arrivé à t’exprimer dans la rue ? 

« J’ai toujours eu un certain goût pour le dessin. Plus jeune j’étais même encouragé par mes profs. Mais en grandissant et avec les choix étudiant, je n’ai pas persévéré dans cette voie. Et puis lors d’un voyage en Equateur, en remontant vers la Colombie, j’ai décidé de chaque jour croquer des paysages, de scènes de la vie quotidienne. De là est née une interaction avec les gens qui me regardaient dessiner et c’est quelque chose qui m’a plu. De retour en France j’ai commencé à peindre à partir de photos. Sur ces peintures je faisais les contours au stylo noir (ce qui deviendra sa signature stylistique). Mais lors d’un week-end à Berlin j’ai découvert le Street Art d’un oeil différent. Ce n’était pas comme à Paris, à Berlin l’Art est partout ! En revenant à Paris j’ai vu le Street Art différemment. A l’époque (encore aujourd’hui d’ailleurs) il y avait Da Cruz qui retournait Ourcq. Tout ce mélange m’a donné envie de coller, de m’exprimer dans la rue et de là j’ai commencé à vraiment découvrir la scène parisienne. »

Critiques de la société, messages politiques, sur fond d’influence tropicale :

Le style de JBC, très esthétique, n’est cependant pas si facile à décrire. Personnages soignés, contours épais noirs, un mélange de vintage années 70 dans l’allure générale, tout cela mêlé à des influences sud-américaines que ce  soit dans les couleurs, les compositions et l’engagement, font des ouvres de JBC quelque chose de complet et complexe.

« De part mes voyages, l’Amérique latine et les tropiques sont mes principales sources d’influence. Par exemple, chaque partie du corps de mes personnages est emboîté à la manière des pierres des temples Inca. Pour ce qui est des couleurs j’aime l’harmonie. La couleur en tant que telle n’a pas de force, elle puise sa force dans son interaction avec les autres. Street Art rime avec engagement pour moi, ça passe donc par des actions, des collages où je dénonce en montrant ce qui me dérange. »

Pourquoi la cabine téléphonique sur les Champs ?

En février 2012, l’artiste a totalement recouvert une cabine avec des collages « Vive le Fric ».

« A la base je voulais me faire une boîte aux lettres. Mais en y regardant de plus près, il n’y avait pas de boîte mais cette cabine qui était juste en face de chez Louis Vuitton et du Fouquet’s. Le Fouquet’s qui a aujourd’hui une signification « politique ». Je voulais rompre avec le fait de ne coller que la nuit, car ce que j’aime c’est l’interaction avec les passants, la curiosité que ça draine. L’oeuvre c’est aussi l’acte, c’est un tout, c’est pour ça que j’ai voulu le faire en journée et filmé. Avec cette action j’ai voulu créer une déshumanisation. Le logo prend le pas sur le langage. Ce collage fait écho à un précédent qui s’intitulait  »Tout le monde a le droit de consommer ». »

Défense de coller ! 

Après s’être attaqué aux Champs, c’est à la Défense qu’il décide de s’exprimer. Un lieu fort en dans la symbolique du contrôle de la finance et du poids qu’elle représente.

« A la Défense il a manqué l’interaction avec les gens, car j’y suis allé à un moment de faible affluence. C’était volontaire car je me méfiais su service de sécurité de la Défense mais pour le coup il n’y avait pas vraiment de monde. Mon but aujourd’hui c’est de plutôt faire des performances, et pas que des trucs éparses, mais surtout réaliser mes oeuvres aux heures d’affluence et filmer le tout. »

Des messages à faire passer, des remarques sur la scène parisienne ?

« A Paris je vois un Street Art interactif, insolite se développer, ça c’est cool. Par contre je trouve qu’avec le contexte actuel, la crise… on vit des moments spéciaux et je pense que les artistes devraient prendre leur responsabilité et parler de ce contexte. En France c’est dommage que trop peu d’artistes soulignent ce qui se passe. A l’étranger le Street Art est beaucoup plus violent. En Amérique du sud par exemple, les artistes ont cette mentalité de squatter des immeubles, de vivre entre eux, c’est assez underground au final. Et puis se faire choper à Bogota c’est pas la même que se faire choper à Belleville. Là-bas c’est beaucoup plus clandestin. »

Des projets ?

« Je vais en Colombie dans quelques semaines, je vais essayé de faire un truc là-bas avec des artistes locaux et pourquoi pas une collab. Sinon il y aura des petites expos en automne. »

Retrouvez l’intégralité des travaux de JBC sur son site.



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