Depuis quelques temps maintenant nous vous parlons de Vermibus, artiste talentueux, discret et mystérieux, qui défigure les modèles des affiches des grandes marques à coups de pinceau et dissolvant.
Si nous sommes nombreux à connaître son travail dans les rues, nous en savons moins sur l’homme et ses motivations.
Curieux et intéressés par ses actions, nous avons cherché à en savoir un peu plus sur l’artiste. Après plusieurs contacts, Vermibus a accepté de répondre à quelques unes de nos questions.
Bonjour Vermibus, peux-tu te présenter en quelques lignes ?
Vermibus : Je suis Vermibus, un artiste et activiste Majorquin (ndlr : de l’île de Majorque) installé à Berlin depuis 2011.
Il y a dans mon travail, deux lignes très marquées : l’une est une critique directe de la beauté pré-imposée par le monde de la mode et de la publicité, l’autre porte sur le manque de questionnement des habitants sur la place qu’occupe la publicité dans l’espace public.
Peter Grünheim
D’où vient le nom Vermibus ? Y-a-t-il une signification particulière ?
V : On dit que le mot Cadaver (cadavre en français) vient de “CAro DAta VERmibus” qui signifie « viande donnée aux vers ».
J’ai choisi Vermibus comme pseudonyme à la manière dont je vois les models sur les affiches publicitaires qui, après tout le processus de transformation auxquels ils sont soumis, du maquillage, aux lumières, en passant par les retouches photo, cessent d’être des individus pour devenir de la viande, leur identité étant remplacée par celle de la marque.
Andreu Doz
Quand as-tu commencé à travailler dans la rue ?
V : J’ai commencé dans le monde du graffiti en 1998 à l’âge de 10 ans. A l’époque, je ne savais pas très bien ce que je faisais. Plus tard, en 2011, quand j’ai bougé à Berlin, j’ai décidé de me laisser porter par mes valeurs et j’ai découvert la direction dans laquelle je travaille aujourd’hui.
Peter Grünheim
Comment as-tu trouvé cette manière de travailler avec l’utilisation du dissolvant ?
V : Je crois pleinemment en l’erreur comme base structurelle du savoir et de l’apprentissage à chaque fois que tu as les yeux et les sens ouverts. En partant de là, je peux dire que la technique que j’utilise est plus le fruit d’une erreur que d’une forme consciente.
J’ai toujours aimé expérimenter avec différents matériels, le dissolvant te permet de faire beaucoup de choses, il a toujours été lié à la peinture d’une manière ou d’une autre.
Le processus de découverte a été assez basique, j’essayais des choses mais j’ai obtenu un résultat plus intéressant que ce que j’attendais. Pour tout le reste, je continue à expérimenter, à étudier comment affectent les différents dissolvants sur les différents papiers, les différentes couleurs…
Artworks
J’ai pu lire que tu avais été photographe pour une agence de publicité. Maintenant tu combats ce monde et par là même ton ancien travail. Pourquoi ? Quel est le message ?
V : Pendant quelques temps, j’ai travaillé dans une agence de publicité qui avait un manque important d’éthique, influençant les gens à acquérir un style de vie des plus banal. C’est l’une des choses que j’ai pu faire pour gagner de l’argent qui va le plus plus à mon encontre et je n’en suis pas fier.
Au final, cette expérience et une série d’événements m’ont amenés à réfléchir sur mes propres valeurs et suite à ça, j’ai décidé de m’investir et de développer le projet sur lequel je travaille actuellement.
Artworks
Aujourd’hui on parle beaucoup de Street Art. Pour toi, l’adbusting est-il une part du Street Art ou est-ce que ce sont deux choses différentes ? Où ton travail se positionne-t-il ?
V : Répondre à cette question sans entrer dans un long et large débat est très compliqué.
Il y a quelques années on parlait et polémiquait beaucoup sur les différences entre Street Art et graffiti. Aujourd’hui, il semble que les gens ont compris la différence et les opinions vont plus ou moins toutes dans la même direction.
Mon travail est positionné là où on (les gens) le positionnent, la majorité le voit comme du Street Art et c’est ainsi qu’ils m’ont catégorisés.
Personnellement, je le vois comme de la peinture dans l’espace public. Le terme « Street Art » me semble être un mot fourre-tout et s’il est impossible de créer des catégories alors je pense que l’on doit être plus spécifique et que ce terme n’est pas suffisant.
Après, sur le fait de dire que l’adbusting est Street Art ou pas… Pour moi l’adbusting c’est de l’activisme, dans mon cas je considère qu’il est artistique, mais dans d’autres cas non et continue de n’être qu’adbusting.
Thomas von Wittich
Ton travail est surtout basé sur les affiches publicitaires. Vas-tu explorer d’autres supports ? Quels sont tes projets à venir ?
V : J’ai plein de projets en parallèle dans ma tête, mais pour le moment je suis concentré sur ce projet (ndlr : dissolve). Je préfère me concentrer sur le présent sans m’arrêter, c’est ainsi que viennent les nouvelles idées et les nouveaux projets.
Thomas von Wittich
Merci à Vermibus d’avoir répondu à nos questions.
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